RECIT
HISTOIRE D’HISTOIRE
Nous sommes dans le sud
de la Haute-Marne en sep-
tembre 1944. L’armée al-
lemande est en pleine dé-
route. Elle est destabilisée
à l’Est par l’avancée de
l’Armée Rouge. Elle est
prise en tenaille en France,
par les troupes du général
de Lattre de Tassigny et du
général américain Patch
qui ont débarqué en
Provence le 15 août et par
celles de la coalition alliée
américaine, anglaise, ca-
nadienne, française... qui
ont pris pied sur le conti-
nent le 6 juin, en
Normandie sous la direc-
tion du général
Eisenhower. Les deux
armées, l’une venant du
midi, l’autre de l’ouest ef-
fectuent un point de jonc-
tion près de Dijon le 11
septembre. L’armée enne-
mie multiplie les exac-
tions, les massacres ; pen-
dant ce temps la 2ème DB,
sous les ordres du général
Leclerc, participe active-
ment à la reconquête de la
Haute-Marne. Le 30 août
Saint-Dizier est libéré.
Andelot devra être assiégé
pendant 12 jours, ce villa-
ge est situé sur la ligne de
défense allemande et ne
sera reconquis que le 12
septembre.
Les maquis, qui représentent
en Haute-Marne une popula-
tion de 3000 à 4000 hommes,
accentuent harcèlements et
sabotages, guident et rensei-
gnent les alliés. Armés grâce
à des parachutages, ils parti-
cipent activement à la libé-
ration du territoire.
Et tout avant la libération du
département, un nouveau ma-
quis voit le jour, le maquis
de Bussières. Henri Hutinet
en est l’initiateur, sans doute
à la demande du Colonel de
Grouchy, commandant des
F.F.I. de Haute-Marne. Sa
durée sera brève, à peine un
mois, du 20 août au 15 sep-
tembre mais son importance
a été reconnue en raison du
nombre de maquisards, 750,
de la qualité de ceux qui vont
se rallier à cette unité com-
battante : Spiro seconde
Henri Hutinet, il a acquis une
expérience dans son passage
à la légion étrangère et dans
les maquis alpins. Le capi-
taine de gendarmerie de la
section de Langres,
Stanguenec vient en renfort
avec les brigades du sud. Le
premier régiment de France,
avec 3 officiers, 4 sous-offi-
ciers vient grossir les rangs
des maquisards. Trois anglais
et deux français de la France
Libre sont parachutés.
L’aviation alliée intervient
pour soutenir les engage-
ments et détruire les arme-
ments envoyés aux troupes
allemandes. Les combats qui
vont être menés ont été
considérés, après la bataille
de Langres comme étant les
plus importants du sud haut-
marnais, en particulier, les
deux batailles de Belmont,
l’une soutenue le 11 sep-
tembre, la seconde le 13 sep-
tembre.
C’est dans ce contexte que
vont se dérouler les faits que
nous allons relater.
Un hôpital de campagne était
nécessaire pour soigner les
blessés. Trois jeunes filles qui
font partie des F.F.I. de
Bourgogne sont volontaires.
Elles ont une vingtaine
d’années. Il s’agit de Louise
Bailly et de Micheline Morey
âgées de 22 ans et de
Geneviève Cornubert, de 21
ans. On les installe, le 10 sep-
tembre, au château de Saulle.
Le 11 septembre sont pré-
sents un blessé, quatre ou
cinq F.F.I., monsieur
Boissemin, le gardien du châ-
teau. Après la bataille de
Belmont, les allemands re-
fluent sur Saulle et à 22
heures, cernent le château.
Les F.F.I. réussissent à s’en-
fuir sauf le blessé et un ma-
quisard qui l’assiste. Ils sont
tués par balle. Monsieur
Boissemin est torturé et gît
inanimé dans une salle du bas
du château et les trois jeunes
filles vont être torturées tou-
te la nuit et une partie de la
matinée. Les cris de douleur
entendus par monsieur
Boissemin qui reprend
conscience, les corps tumé-
fiés et les os brisés témoi-
gnent des horreurs subies.
Cet acharnement est dû au
refus de parler des jeunes
filles, de donner quelques
renseignements que ce soit
sur les maquis. Leurs corps
seront retrouvés après bien
des recherches sous un tas
d’ordures. Lorsque la popu-
lation de Bussières apprend
le martyre des trois jeunes
filles, la fureur est à son
comble. Les bourreaux se-
ront retrouvés, deux d’entre
eux seront fusillés à
Bussières même, la popula-
tion assistant à cette exécu-
tion, le troisième le sera à
Besançon.
Lors des obsèques des jeunes
filles, les honneurs militaires
leur sont rendus. Et en 1947,
on érigera un monument pour
perpétuer leur souvenir et
lors de son inauguration, elles
seront décorées de la croix
de guerre, de la croix de la
résistance et de la légion
d’honneur. La population de
Bussières était à nouveau ras-
semblée non seulement en
raison du sort tragique de ces
enfants du pays mais parce
qu’elles étaient devenues le
symbole de la résistance dans
sa plus pure expression.
“La voix qui monte des fers
parle aux hommes
de demain.”
Aragon
Jacqueline Cécile Gérouville
page 19
Trois jeunes filles engagées dans la Résistance
De droite à gauche Louise Bailly et Micheline Morey
et au premier plan Geneviève Cornubert.
EN HAUT
Elle avait de longues et belles jambes, le souffle court
d'avoir tant couru jusqu'à la gare et d'avoir pourtant raté
SON train.
Pas le MIEN, non le SIEN.
Aussi, sans vraiment le vouloir, le savoir, on s'approprie des
choses, certaines de fait nous appartiennent en propre,
MON dentier, MES lunettes, MON tricot. Mais on fait
de même avec SON avion SON bus qui ainsi ne sont
qu'accessoirement aux autres.
Dans MA tête et heureusement plus rarement dans celle des
autres, il y a un petit vélo, sans selle et sans pédales, dans
ces conditions, difficile de faire avancer cette foutue bé-
canne et par conséquent de m'enlever les absurdités que je
trimballe.
Ainsi hier j'écrivais à une amie (vous avez noté que je
précise UNE et non pas MON amie ) et je lui racontais
qu'on venait de fêter l'anniversaire du canapé acheté l'an
dernier et qu'à cette occasion on avait décidé de lui donné
un nom. C'est important de nommer les choses pour
qu'elles existent pour de bon, pour de vrai. On hésite entre
Oscar et Gédéon. Avouez que ça prend un autre sens de
s'asseoir sur Gédéon que sur un canapé on s'y laisse moins
s'avachir, ça vous donne comme un coup de jeune.
Pour certaines tribus nomades aborigènes d'Australie nom-
mer et chanter le nom sont des rites vitaux pour pouvoir
s'approprié provisoirement un territoire, un ruisseau.
Dire on ne badine pas avec le Badin c'est se situer, presque
le voir, suivre son cours y regarder SES poissons.
C'est pourquoi en ces temps ou la paysannerie se trans-
forme en entreprise, ou les troupeaux dépassent la centaines
de bêtes on ne peut plus nommer les vaches.
Dire "la Justine fille d'Aubépine a un problème au sabot de
l'avant droit " ça a une autre allure que "la 4423 boite".
Les numéros ravivent de sinistres souvenirs, déportés, pri-
sonniers, cadavres anonymes, aussi je voudrais tant que
MES paysans fassent un effort, il y a des milliers de fleurs
on leur a bien trouvé un nom, myosotis, muguet, margue-
rite, millepertuis, mélisse...
Allez donnez moi une mirabelle et je me tais.
Pierre Schwaar
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